Trop tôt dans la saison pour que la route de la Fontaine de l'Ours ne soit ouverte, les plaques de verglas sont maîtres des lieux. Nuit au chaud dans nos duvets, un peu en pente ;-) Le lendemain matin, les lacets jusqu'à la Fontaine sont un peu lancinants. Nous découvrons la statue de l'ours et entamons le chemin des pyramides avec ses superbes belvédères sur le lac de Serre-Ponçon et ces amas verticaux de roches érodées. Le Morgon nous fait des clins d’œil entre deux arbres, aux détours des chemins qui alternent entre neige et sol déneigé. L'arrivée aux portes nous offre le cirque, somptueux, recouvert d'une neige épaisse. Ce lieu est magique. Le Morgon se dresse avec quelques zones soufflées par le vent vers son sommet. Après une pause casse-croûte, nous entamons la suite de notre boucle, rejoignons le col de la Baisse enivrés par la beauté du cirque qui nous entoure. Le lac se dissimule sous son épaisse couche de neige. Après le col, le plan galère commence. Nous saurons après que ce chemin est chaotique l'été, l'hiver c'est complètement déraisonnable et je ne suis pas fière de cette épopée. Pas de trace, nous nous fions au GPS. La pente est prononcée, nous espérons trouver une trace et atteindre les lacets qui doivent nous permettre de descendre. Nous enchaînons les traversées de pentes enneigées et exposées, soufflons quand nous trouvons quelques arbres. Faire la trace avec ce dévers est épuisant et l'incertitude de la tenue de la neige pesante. Une crête nous laisse espérer la fin de l'épreuve mais c'est un leurre, derrière il y a des rochers et une pente encore plus impressionnante. D'après le GPS, nous sommes sur le chemin mais là, devant, nous ne passerons pas. Nous cherchons à contourner la difficulté par le dessous, en vain. Après plusieurs glissades sans conséquence, la fatigue est très présente et chacun se demande en silence si nous n'aurons pas à passer la nuit dehors. Ça serait un moindre mal par rapport à une avalanche. Notre bâche et nos couvertures de survie pourraient nous le permettre. 3 options s'offrent à nous :
- le demi tour mais repasser dans nos traces nous semble hautement risqué,
- remonter tout droit mais la fatigue nous en dissuade,
- descendre tout droit dans la pente pour rejoindre le fond du torrent du Colombier et tenter de rejoindre l'endroit où nous l'avons croisé le matin, c'est l'option que nous choisissons en espérant qu'aucun ressaut ne bloquera notre évolution.
Nous abandonnons les raquettes pour les crampons. La descente est sportive, très en pente, avec des changements importants de neige parfois glacée, parfois poudreuse jusqu'en haut de la cuisse. En fin de descente, nous marchons sur les restes d'une avalanche, elles sont nombreuses dans ce fond de cirque. Pas de ressaut, nous rejoignons enfin le torrent (quel soulagement !), puis le chemin du matin.
Ne prenez pas cette rando en exemple, nous avons eu énormément de chance que la neige tienne et je ne suis vraiment pas fière de cette galère même si nous avons su maintenir la cohésion.
Nous n'aurons rencontré personne, juste croisé monsieur lapin blanc, affolé de voir des intrus, et un chamois furtif qui détalait dans la pente.
Merci Madame Montagne de nous avoir laissés rentrer.